« — Artaxerxès Gloubiboulg, savez-vous que l’on vous compare à un monstre ? Vous êtes là, avachi, gras, adipeux et qui plus est obèse, et vous portez un chapeau ridicule, si je puis me permettre. Il paraît même que votre chien a le droit de dormir dans votre lit alors que vous réservez sa niche à votre femme…
— C’est exact, et alors ? Vous-même, mademoiselle, n’avez-vous pas quelques mauvaises habitudes secrètes ?
J’étais abasourdie. Comment cet être immonde autant qu’imparfait avait-il pu en quelques secondes me percer à jour ? Comment pouvait-il savoir par exemple que j’aimais humer les boulettes de crasse recueillies entre mes orteils et manger du saucisson en lisant le dernier livre de François Nourrissier ? La nuit s’annonçait longue, et la conversation houleuse. Je baissais les yeux, écœurée, lorsqu’il sortit de son nez hideux un long filament de morve verdâtre et torsadé, maculé de fines touches de sang en certains endroits. » (p. 11)

« Johnny est à table. Sa crinière de Gémeaux sublime (comme Céline) accroche les rayons de lumière bleue du néon en forme de guidon de Harley Davidson accroché au mur blanc. Bleu et blanc, son œil torve scrute les flageolets au lard qui s’agitent mollement au bout de sa fourchette. Il est sombre. L’apathie vient en mangeant. À ses côtés, la blonde Laetitia est la seule à pouvoir comprendre le tumulte intérieur qui agite son fauve. Il n’aurait jamais dû chanter Allumer le feu devant le carmel d’Auschwitz. Désormais, pour les médias, il n’est plus qu’un rocker fini, l’antisémite de service dont les vermines se régalent. Pour Laetitia, il est Jean-Philippe Smet, un être fragile et perturbé. Peut-être qu’une petite pipe lui ferait du bien ? » (p. 56)

« Samedi 13 octobre. Mon article sur les top-models nazis qui portent de la fourrure en acrylique pour faire croire qu’ils protègent les animaux alors qu’ils se maquillent avec des cosmétiques fascistes a fait sensation : personne n’en a parlé dans la presse… Aurait-on peur de la vérité au point de me boycotter ? Toujours pas d’idée pour mon prochain édito dans Charlie Hebdo, qu’un journal (d’extrême-droite évidemment) appelle déjà le Non-événement du mercredi, en vue, bien sûr, de me discréditer aux yeux du Parti socialiste…
Dimanche 14 octobre. En glissant sur une crotte de chien ce matin, je trouve le sujet de mon prochain article : Les crottes de chiens sont nazies.
Lundi 15 octobre. Fin de mon article. Après avoir mûrement réfléchi et en avoir longuement discuté avec Cavanna et Gébé, j’opte plutôt pour ce titre, beaucoup plus provocateur : Les merdes de chiens sont nazies. Ah ! Je suis remonté !
Mardi 16 octobre. Un lecteur m’envoie un livre de Léon Bloy, alors que tout le monde sait que je n’aime que Philippe Delerm et les auteurs de gauche comme Philippe Delerm par exemple… Fasciste ! Pour me calmer je lis le dernier livre de Gérard Miller : cet homme est un génie, sans doute le grand écrivain du XXIème siècle.
Mercredi 17 octobre. Parution de Charlie Hebdo. Mon article va-t-il enfin faire bouger les choses sur les trottoirs de Paris ?… J’attends les réactions de la droite avec un sourire narquois. » (p. 2)

« Voici le troisième volume des mémoires de DJ Zukry, qui fait suite à Mon hagiographie et à Dieu et moi. Par un style sobre, ce prophète des temps modernes, que l’on a un peu trop vite taxé de mégalomanie, revient sur son œuvre déjà immense, et anticipe même ce qui adviendra de lui par la suite (on apprend ainsi qu’il obtiendra le prix Goncourt 2012 et qu’il entrera à l’Académie Française en 2038…).
« À la fois autobiographie, roman, essai, conte et livre de cuisine, ce volume est à lire avec à la main un verre de sirop Teisseire, 1 volume de sirop pour 6 volumes d’eau très fraîche… »
(extrait de la préface de Philippe Sollers)