EDIFIANT |
(NERF SALISSANTOR) |
Assidu des lieux publics et de la Veuve Coudère je m’expose donc régulièrement aux assauts d’inextinguibles fans de la dernière heure. La mécanique est maintenant bien huilée : a) Entrée en matière faussement timide : « Ah, ne serait-ce pas toi qui écrit dans Bigorno ? » On notera d’ailleurs ici la double fonction de l’emploi du tutoiement. Primo, il permet de faire copain-copain avec le Génie et donc d’épater tout témoin de la scène. Ensuite, le fan peut ainsi montrer qu’il a bien compris sur qui repose Bigorno. Bigorno, c’est NS. ![]() b) Discussion molle et stérile qui, sans franchement m’extasier, ne m’importune pas plus que ça non plus : je suis connu, mon génie et ma sacro-sainte Notoriété se portent bien, l’ensemble étant parfaitement bien assumé, tout comme les dérisoires dérangements que cela engendre. c) La situation devient des plus irritante dès lors que le fan, pour renforcer sa position d’ami de moi se lance dans un tas de questions toutes aussi abjectes les unes que les autres. Et voilà le boulot : « Mais quel est ton message ? » ou encore « Ne serais tu pas un peu anar ? » (si, si !!), « Penses tu ce que tu dis ? ». A cet instant, il m’est douloureux de poursuivre la mascarade, mais quand ma bière n’est pas complètement honorée, je consens parfois à répondre. L’ennui vient du fait que souvent le fan est très con. Le fan ne veut pas admettre l’absence de message ou de toute accointance politique. Alors le fan pleure, trépigne, réclame, avant que le fan désorienté ne capitule : « Mais alors pourquoi faîtes-vous ça ? ». Le fan en perd son tutoiement. Alors ? Alors il va être temps d’admettre que ma participation à ce putain de fanzine n’a d’autre dessein que d’accentuer cette sacro-sainte fierté citée plus haut. Notoriété seule m’intéresse, m’encourage. Elle seule pousse le Génie. Alors ? Alors comptez pas sur moi pour amener je ne sais quelle idée novatrice. Relisez Pompon bordel !!! Jamais ma plume ne saura vous dessiner un monde meilleur, le mien est parfait. Et puis, pourquoi de nouvelles idées ? Vous vous foutez bien du propos : le nom du chirurgien ça oui ! là où il plante le scalpel on s’en tamponne ! Alors ? Alors bien sûr ça m’arrange. Merci bien, ah ça oui ! même plus besoin de se creuser le coquillard pour le choper le fichu Graal. Notoriété croît toute seule, mécanique à chaque nouveau numéro. La statue arrive et déjà les filles qui pleuvent. Cris, gémissements, pleurs et implorations pour que ma laideur les soigne. Je ne les fais pourtant pas jouir, je ne jouis d’ailleurs pas moi-même. Pas envie, pas le but. Juste continuer à les prendre vos coquines, elles viendront, pierres à l’édifice de ma statue. Un jour , je vous remercierai. |
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